Des utilisateurs du réseau social chinois Weibo ont affirmé qu’un “humain en costume” prétendant être un ours avait été aperçu dans un zoo. Les vidéos de la scène qui montre un ours debout, saluant la foule, se sont répandues sur d’autres réseaux sociaux et ont suscité beaucoup d’interrogations à l’échelle internationale. Si le zoo de Hangzhou a démenti l’information en expliquant qu’il s’agissait d’un ours malais, un zoologue contacté par la RTBF a pu confirmer que les images virales étaient bien celle d’un animal et non d’un homme.
Une vidéo diffusée sur le réseau social Weibo dans laquelle un ours est dressé sur ses deux pattes et salue la foule est rapidement devenue virale. L’une des publications mise en ligne le 31 juillet 2023 a rapidement dépassé les 394.000 vues avant de traverser les frontières chinoises et d’alimenter des publications sur des réseaux sociaux comme Instagram ou X (ex-Twitter).
Plusieurs utilisateurs ont commenté ces vidéos en affirmant qu’il ne s’agissait pas d’un ours mais d’un homme déguisé. En effet, son apparence a de quoi surprendre : l’ours est petit, mince et son postérieur fripé a l’apparence d’un pantalon froissé. Les réactions à cette séquence ont suscité des centaines de milliers de vues sur X (1, 2).
Le zoo a publié une déclaration pour contester ces accusations
Devant la multiplication des commentaires et la viralité de la séquence diffusée, le zoo de Hangzhou a publié un message à la première personne du singulier dans lequel l’oursonne “Angela” se présente et explique appartenir à une espèce méconnue du grand public, celle des ours malais. “Certains touristes pensaient que j’étais petite et pas un ours !”, “Pas un ours noir ! Pas un chien !”. “Permettez-moi de souligner à nouveau : je suis un ours du soleil !”. C’est une tache circulaire et légèrement dorée présente sur son thorax qui lui vaut ce surnom.
En réaction à des sollicitations médiatiques suite aux questions soulevées, un employé du parc animalier a affirmé à l’agence de presse AP que des visites avaient été organisées pour les journalistes ce lundi 31 juillet pour constater par eux-mêmes qu’il s’agissait bien d’un ours.
Quelques jours plus tard, un média chinois (Chao News) a par ailleurs indiqué que suite à l’engouement suscité par l’attitude “humaine” de l’ours, le zoo avait constaté une augmentation de sa fréquentation de 30%, soit 22.000 visiteurs. Une information reprise par l’agence de presse Reuters.
L’ours a naturellement une posture similaire à celle de l’humain
Pierre Rasmont, professeur pensionné de zoologie à l’UMons, a visionné ces vidéos et n’est pas surpris par les réactions qu’elles ont suscitées. “Dans la culture animiste, l’ours est souvent assimilé à l’homme et on l’appelle même le vieil homme.” Selon lui, cela s’explique par le fait qu’ils sont plantigrades, c’est-à-dire qu’ils peuvent se tenir debout et marcher sur leurs pattes arrière. De plus, les ours “sont aussi particulièrement agiles avec leurs pattes avant, avec lesquelles ils peuvent ouvrir une ruche pour en extraire le miel, à l’image de nos cousins chimpanzés”.
Interrogé par CNN sur les similarités entre les ours et les hommes ainsi que sur leurs facultés à se tenir debout sur leurs deux jambes, Won Siew, fondateur du Centre de conservation des ours malais de Borné, partage l’analyse de M. Rasmont.
L’ancien professeur de zoologie de l’UMons indique cependant que la morphologie de l’ours malais est bien différente de celle de l’humain : ses pattes postérieures sont courtes et son torse est proportionnellement plus long que le nôtre. Cependant, il ajoute que “la salutation qu’il adresse aux visiteurs n’est en rien naturelle et s’explique par son niveau intellectuel élevé, similaire à celui d’autres espèces apprivoisées telles que les chiens ou les chats. Ainsi, il a sûrement compris au contact des visiteurs que certains de ses gestes lui permettaient de recevoir de la nourriture.”
Une espèce en voie de disparition
Si les images de cet ours malais ont suscité autant de réactions, notamment en Europe, c’est notamment parce que cette race est relativement méconnue du grand public. En effet, cette espèce d’ours, qui est la plus petite des ursidés (entre 1 m et 1,5 m pour les individus adultes), vit dans les forêts tropicales d’Asie du Sud-Est. Le WWF (Fonds mondial pour la nature) explique par ailleurs que les ours malais sont d’excellents grimpeurs et qu’ils passent beaucoup de temps dans les arbres. Ils se nourrissent de fruits sucrés, de petits rongeurs, d’oiseaux, de termites et d’autres insectes.
Selon le site spécialisé ManimalWorld, cette espèce peut être observée au nord-est de l’Inde, au Bangladesh et en Asie du Sud-Est, du sud de la Chine à l’Indonésie. L’ours malais est menacé en raison de trafics liés la prétendue vertu médicinale de sa bile.
“C’est probablement l’un de ceux qui ont le plus petit nombre d’individus dans le monde”, expliquait à l’AFP Géraldine Véron, commissaire scientifique de l’exposition “Espèces d’ours” à Paris en 2016. À cette époque, ils n’étaient déjà pas plus de 10.000 au total. Une estimation, faute de données suffisantes.
Une suspicion alimentée par plusieurs polémiques précédentes
La suspicion engendrée par cet ours malais au zoo de Hangzhou rappelle le cas d’un chien mastiff tibétain présenté comme un lion, en 2013, dans un zoo chinois de la province centrale du Henan. Le chef du département des animaux du parc, Liu Suya, avait déclaré à CNN que les animaux étaient remplacés pour diverses raisons et qu’ils seraient “bientôt de retour” à leur place légitime.
En 2018, un zoo égyptien avait aussi été épinglé par des internautes sur les réseaux sociaux pour avoir peint des lignes noires et blanches sur des ânes afin de les faire passer pour des zèbres. Ces polémiques alimentent parfois la suspicion de visiteurs quant à l’authenticité des espèces exposées dans certains parcs zoologiques.
