Ce jeudi 29 août sur CNN, Kamala Harris, accompagnée de Tim Walz, a défendu son programme et le bilan de Joe Biden. Faky a vérifié certaines déclarations portant sur l’énergie, l’inflation ou le COVID-19 que la candidate et son colistier ont prononcé pour la première interview officielle de leur campagne.
Pendant vingt-sept minutes, la candidate démocrate à la Maison-Blanche, Kamala Harris, a répondu aux questions de la présentatrice de CNN Dana Bash pour la première interview officielle de sa campagne.
Accompagnée du candidat démocrate à la vice-présidence, le gouverneur du Minnesota Tim Walz, l’ancienne procureur a défendu ses positions sur l’énergie, l’immigration et le conflit au Proche-Orient, tout en saluant le bilan de l’actuel président américain, Joe Biden.
Voici une vérification des faits concernant certaines réponses de Harris et de son colistier, incluant une déclaration erronée et une information qui manque de contexte.
“Je l’ai clairement indiqué en 2020 : je n’interdirais pas la fracturation hydraulique” – Affirmation trompeuse
Face à Kamala Harris, la présentatrice de CNN a ressorti une archive de 2019 durant laquelle la vice-présidente avait indiqué sur CNN : “Il ne fait aucun doute que je suis en faveur de l’interdiction de la fracturation [hydraulique].”
Ce jeudi soir, Dana Bash l’interroge sur sa position vis-à-vis de cette méthode de forage qui consiste à créer des fissures souterraines en injectant un mélange d’eau, de produits chimiques et de sable à haute pression pour accéder à des réserves de pétrole et de gaz. Cette technique est controversée en raison de son impact environnemental et de ses effets néfastes sur la santé humaine.
Sans détour, Kamala Harris répond : “Non, et je l’ai clairement indiqué lors du débat en 2020 : je n’interdirai pas la fracturation hydraulique. En tant que vice-présidente, je n’ai pas interdit la fracturation hydraulique. En tant que présidente, je n’interdirai pas la fracturation hydraulique”.
Sauf que cette affirmation est trompeuse. L’actuelle vice-présidente n’avait pas clairement exprimé sa position sur la fracturation hydraulique lors de ce débat en 2020 durant lequel elle s’était exprimée face au vice-président d’alors, Mike Pence. Comme l’écrivent les journalistes de CNN, se référant à la transcription de ce débat, “Harris n’a jamais explicitement exprimé sa position personnelle sur la fracturation hydraulique au cours de ce débat. Elle a plutôt déclaré que Joe Biden, le chef de file démocrate à l’époque, n’interdirait pas la fracturation hydraulique s’il était élu président.”
Pour preuve, durant ce débat en 2020, elle avait affirmé : “Joe Biden ne mettra pas fin à la fracturation hydraulique” ; “Je le répète, et le peuple américain le sait, Joe Biden n’interdira pas la fracturation hydraulique”.
À ce moment-là, Kamala Harris venait d’être choisie par Joe Biden comme colistière. Elle parlait alors en son nom à lui mais n’avait pas “clairement indiqué” sa position personnelle comme elle le prétend sur CNN ce jeudi.
“Nous avons créé plus de 300.000 nouveaux emplois dans le domaine des énergies propres” – Affirmation décontextualisée
Durant cette interview, Kamala Harris a salué l’héritage politique de Joe Biden. À commencer par son bilan économique. Elle a affirmé que durant son mandat, “plus de 300.000 nouveaux emplois dans le domaine des énergies propres” ont été créés.
Cette estimation émane d’un décompte effectué en juin par le groupe de communication Climate Power. Suivant sa méthodologie détaillée par CNN, ce chiffre “a été établi en additionnant les emplois promis par les entreprises lors de l’annonce publique de 585 projets d’énergie propre après l’adoption de la loi sur la réduction de l’inflation jusqu’en mai 2024, soit un total de 312.900 emplois annoncés.” Or, ajoutent les journalistes de CNN, “tous ces emplois n’ont pas déjà été créés. Le chiffre le plus élevé de Climate Power ne fait pas non plus de distinction entre les emplois de construction de nouvelles usines et les emplois à long terme dans ces usines – emplois de fabrication de batteries, de panneaux solaires et de véhicules électriques, entre autres.”
Par ailleurs, la chaîne américaine pointe d’autres études qui font état d’estimations inférieures à celle de Climate Power. Ainsi, “E2, un autre groupe d’énergie propre qui suit les investissements et les emplois liés à la loi sur la réduction de l’inflation, a recensé plus de 109.000 nouveaux emplois dans le secteur des énergies propres créés ou annoncés entre août 2022 et mai 2024, soit un chiffre nettement inférieur à celui de Climate Power. Un récent rapport du ministère américain de l’Énergie a révélé que 142.000 nouveaux emplois dans le secteur des énergies propres ont été créés en 2023.”
Les différentes méthodologies de ces sources ne permettent pas d’affirmer avec précision combien d’emplois ont été créés dans le domaine des énergies propres. Ce qui est sûr en revanche, c’est qu’il y a eu des créations d’emplois. Et ce, à un niveau non négligeable. C’est ce que révèle ce même rapport du ministère américain de l’Énergie : plus de la moitié (56%) des nouveaux emplois dans le secteur de l’énergie concernait les énergies propres.
“Au plus fort de la pandémie, plus de 10 millions d’emplois avaient été perdus” – Affirmation exacte
Toujours en défendant le mandat de Joe Biden, Kamala Harris a affirmé sur CNN ce jeudi que “lorsque Joe Biden et moi-même sommes entrés en fonction au plus fort de la pandémie, nous avons constaté que plus de 10 millions d’emplois avaient été perdus”.
Cette affirmation est correcte. L’économie a perdu près de 22.000 emplois pratiquement du jour au lendemain lorsque la nouvelle pandémie a frappé. Selon le média Politifact, “lorsque Joe Biden et Kamala Harris ont pris leurs fonctions en janvier 2021, l’emploi avait crû au point que 10 millions d’emplois avaient été perdus par rapport à avant la pandémie.”
En juin 2022, l’emploi avait retrouvé son niveau d’avant la pandémie et, depuis, il a augmenté de plus de 6 millions d’emplois, ajoute le site de fact-checking américain.
“L’inflation est inférieure à 3%” – Affirmation exacte
Autre affirmation pour laquelle la candidate démocrate ne s’est pas trompée. Quand elle a affirmé ce jeudi que l’inflation américaine est maintenant “inférieure à 3%”. C’est vrai.
Dire que l’inflation aux États-Unis a augmenté ces dernières années est une vérité incontestable. Elle a même atteint un pic de 9,1% en juin 2022. Désormais, la variation d’une année sur l’autre de l’indice des prix à la consommation, une mesure de l’inflation, est descendue à 2,9% en juillet 2024.
À titre d’exemple, les prix des produits d’épicerie ont augmenté de 1% entre mai 2023 et mai 2024, contre une hausse de 5,8% au cours de la période de 12 mois précédente, indiquent les données du ministère du Travail.
“Les armes de guerre que j’ai portées pendant la guerre” – Affirmation rectifiée
Aux côtés de Kamala Harris, le gouverneur du Minnesota n’a pas échappé aux questions de la présentatrice Dana Bash. Cette dernière lui a notamment demandé quelques explications sur ses propos tenus en 2018, alors qu’il se présentait au Congrès. Tim Walz avait alors déclaré qu’il “portait une arme de guerre en temps de guerre”. À propos d’une discussion sur la nécessité d’un contrôle des armes à feu, il avait déclaré : “Nous pouvons nous assurer que les armes de guerre que j’ai portées pendant la guerre sont le seul endroit où elles se trouvent”.
Sauf que si Walz a effectivement servi 24 ans dans la Garde nationale, il n’a participé à aucune guerre.
Ce jeudi sur CNN, il a souligné s’être mal exprimé : “Ma grammaire n’est pas toujours correcte”, a-t-il reconnu tout en balayant toute éventuelle critique : “Je suis incroyablement fier d’avoir porté l’uniforme de ce pays pendant 24 ans, et je suis tout aussi fier de mon service dans une classe d’école publique, que ce soit au Congrès ou en tant que gouverneur”, a-t-il déclaré. “Mon bilan parle de lui-même. Je parle en toute franchise. Je porte mes émotions sur mes manches et je parle avec une passion particulière de nos enfants qui sont abattus dans les écoles et autour des armes à feu.”
Selon un journaliste de CNN début août 2024, “rien ne prouve qu’il ait été à un moment donné en position d’être pris pour cible par des tirs et certains de ses propos pourraient facilement être interprétés comme suggérant qu’il l’était”. Donc Tim Walz ne s’est probablement jamais retrouvé en situation de combat durant laquelle il aurait fait usage d’une arme de guerre. Mais il a bel et bien été déployé en 2003 en Italie dans le cadre de l’opération Enduring Freedom, nom officiel de l’intervention des États-Unis en Afghanistan.