Scroll Top

Bataille de chiffres sur l’insécurité à Mons entre Nicolas Martin (PS) et Georges-Louis Bouchez (MR) : qui dit vrai ?

Bataille de chiffres sur l’insécurité à Mons entre Nicolas Martin (PS) et Georges-Louis Bouchez (MR) : qui dit vrai ? - Featured image

Author(s): Guillaume Woelfle et Martin Caulier

À l’occasion d’un débat consacré aux élections communales à Mons, les candidats des deux principales listes, Nicolas Martin (Liste du Bourgmestre – PS) et Georges-Louis Bouchez (Mons en Mieux – MR) se sont affrontés sur les chiffres de l’insécurité. Pour le bourgmestre, les chiffres sont à la baisse ces dernières années et Mons ferait partie des trois grandes villes les plus sûres du pays. Pour le chef de file de Mons en Mieux, il faut prendre une plus longue période, depuis les années 2000, pour voir une augmentation de la criminalité à Mons, notamment en matière de drogue. Selon lui, Mons connaît davantage de criminalité que Molenbeek ou La Louvière. Après analyse, l’un et l’autre ont la plupart du temps raison en fonction des indicateurs et des périodes choisies, mais les chiffres policiers ne veulent pas tout dire, notamment en matière de drogue. La baisse de la criminalité à Mons depuis 2019 ou 2014 est indéniable.

L’émission “Le Monde en direct” de La Première organisait ce mercredi 18 septembre un débat autour des élections communales à Mons. Les quatre têtes de liste étaient autour de la table : Nicolas Martin (Liste du Bourgmestre – PS), Georges-Louis Bouchez (Mons en Mieux – MR), Charlotte De Jaer (Ecolo) et Pascale Grandjean (Les Engagés). Les deux premiers cités se sont affrontés sur le thème de l’insécurité à Mons avec de nombreux chiffres et déclarations factuelles.

Au cours de ce débat, nous avons enregistré six déclarations factuelles et vérifiables :

  • Nicolas Martin : “Mons est l’une des trois villes parmi les douze plus grandes villes du pays où on a le moins de criminalité.”
  • Nicolas Martin : “Une baisse de 30% à 40% de baisse de criminalité sur la mandature : les cambriolages -70%, le vandalisme -55%, les vols et extorsions -60%. Les faits liés à l’intégrité physique sont en baisse également.”
  • Georges-Louis Bouchez : “Ce qui fait baisser la criminalité, ce sont les faits de cambriolages. Or partout, les cambriolages ont considérablement baissé, on parle de deux tiers de cambriolages en moins. C’est la baisse essentielle.”
  • Georges-Louis Bouchez : “Regardez l’augmentation des faits de drogue. Et il ne faut pas prendre une période de deux ou trois ans, […] mais sur dix ans ou vingt ans. […] Si vous reprenez depuis les années 2000, c’est fois cinq en termes de détention de drogue. C’est fois deux en termes de faits liés à la drogue. C’est 25% de plus d’atteintes aux personnes.”
  • Georges-Louis Bouchez : “Nous sommes la ville de Wallonie avec le moins de caméras de surveillance. 500 flux à Namur, plus de 340 à Charleroi, 270 à Liège, 71 à Mons.”
  • Georges-Louis Bouchez : “Nous avons plus d’actes de délinquance par 10.000 habitants qu’à La Louvière, qu’à Molenbeek.”

La criminalité basée sur le chiffre noir, l’insécurité basée sur un sentiment

Avant de vérifier les éléments chiffrés et statistiques de ces affirmations, il est important de reposer deux éléments essentiels mis en avant par les criminologues pour traiter de la criminalité.

D’une part, il faut tenir compte du “chiffre noir” de la criminalité, nous avertissent Vincent Seron, criminologue à l’ULiège et Dieter Burssens, criminologue à l’Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC). Le concept de “chiffre noir” recouvre le principe que les actes criminels enregistrés par la police ne représentent pas fidèlement la criminalité sur le terrain. Les statistiques policières, par définition, ne comptent que les infractions portées à la connaissance de la police. Mais les forces de police ne peuvent pas être partout, être témoins de tout et donc consigner chaque fait criminel. Le chiffre noir, inconnu donc, reprend “des infractions qui sont bel et bien commises sur le terrain, mais qui ne vont pas être portées à la connaissance des autorités puisque personne ne les aura constatées”, explique Vincent Seron, criminologue à l’ULiège. La criminalité réelle ne peut donc pas être réduite aux statistiques policières.

Ces chiffres policiers témoignent davantage de l’action de la police, que de la criminalité réelle

Dieter Burssens, criminologue à l’Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC)

“Ces chiffres policiers témoignent donc davantage de l’action de la police, que de la criminalité réelle, reformule Dieter Burssens, criminologue à l’Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC). Ces chiffres sont ceux que les agents de police enregistrent, mais c’est forcément influencé par leur performance au travail, par les instructions données par les parquets ou les zones de police.”

Ainsi, “si le parquet décide que la lutte contre le trafic de drogue devient une priorité policière, il est normal que davantage de faits soient répertoriés et enregistrés puisque c’est là-dessus que les agents vont se concentrer, sans que cela indique qu’il y ait plus ou moins de faits qu’avant dans la réalité”, illustre Dieter Burssens. C’est en partie ce qui s’est passé à Mons avec la création d’une brigade spécialisée sur le trafic de drogue dans le quartier de la gare. Comme nous le verrons ci-dessous, la police enregistre davantage de délits liés à la drogue, sans que l’on puisse l’attribuer exclusivement à la hausse du trafic ou à la focalisation policière. Mais en une phrase : plus on cherche, plus on trouve.

Il ne faut donc pas conclure trop vite que si les chiffres évoluent dans un sens ou dans l’autre, la criminalité réelle évolue de la même manière. De même qu’il ne faut pas conclure que si la criminalité baisse, l’insécurité ressentie par les citoyens baissera aussi. Et c’est la deuxième balise à poser en criminologie.

L’insécurité est d’abord un sentiment

Dieter Burssens, criminologue à l’Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC)

“L’insécurité est d’abord un sentiment et il n’est pas lié à la criminalité elle-même, pose Dieter Burssens. Elle est bien sûr basée sur le vécu des gens (a-t-on déjà été victime ou témoin d’un délit ?), mais elle se base aussi sur d’autres éléments qui n’impliquent pas forcément de criminalité. Son collègue de l’ULiège cite : “la présence de sans-abri, la saleté dans les rues ou le manque d’éclairage public.” Des éléments qui n’impliquent pas mécaniquement de faits de criminalité supplémentaires.

La hausse du sentiment d’insécurité peut aussi s’expliquer par la couverture médiatique et notre exposition à des images violentes. “Cela tient au fait qu’on voit la criminalité partout dans la presse ou sur les réseaux sociaux, pointe Dieter Burssens. Si on est confronté régulièrement à des images, des vidéos ou des discours violents, on va avoir un sentiment d’insécurité plus important, sans forcément soi-même avoir été victime ou témoin d’un délit ou d’un crime.”

“On constate donc que le sentiment d’insécurité ne baisse pas forcément lorsque la criminalité elle-même baisse”, analyse Dieter Burssens. “J’ai envie de dire que depuis de nombreuses années, on n’a presque jamais été autant en sécurité qu’aujourd’hui (en Belgique, NDLR), mais le ressenti de la population paraît aller dans un sens complètement inverse”, reprend Vincent Seron de l’ULiège.

Les comportements inappropriés sur la route, première cause du sentiment d’insécurité

Les criminologues préfèrent d’ailleurs consulter les chiffres issus d’enquêtes de victimation, plutôt que les chiffres enregistrés par la police pour mesurer la criminalité à un endroit donné. Ces enquêtes sont des questions posées à la population leur demandant de quel fait ils ont été victimes (qu’il y ait eu plainte et intervention policière ou non). Ces enquêtes permettent aussi de donner la parole aux citoyens pour savoir sur quoi se fonde son sentiment d’insécurité.

Ainsi, dans son dernier moniteur de la sécurité décliné pour la zone de police Mons-Quévy, il ressort que “la raison principale à l’origine de ce sentiment d’insécurité est le comportement inapproprié des usagers de la route, notamment la vitesse excessive ou l’agressivité au volant”, comme le relevait la tête de liste Ecolo, Charlotte De Jaer dans le débat. Ainsi un Montois sur deux juge que la vitesse non adaptée est un problème dans son quartier et 37% dénoncent une conduite agressive dans la circulation. La question des cambriolages (14%), des nuisances liées à la consommation d’alcool et/ou de drogues (10%) ou les vols avec violence (3,5%) inquiètent beaucoup moins la population montoise.

Ces balises étant posées, passons à la vérification des faits.

Nicolas Martin : “Mons est l’une des trois villes parmi les douze plus grandes villes du pays où on a le moins de criminalité.”

Pour vérifier cette affirmation, il faut opérer une comparaison entre les douze plus grandes communes du pays en termes de population, Mons étant la douzième. Les chiffres sont ceux des faits enregistrés par la police fédérale en 2023 que l’on rapporte par 10.000 habitants. Pour effectuer cette comparaison, les services de police additionnent les délits enregistrés dans les cinq types de délits les plus fréquents :

  • Les vols et extorsions ;
  • Les dégradations de la propriété ;
  • L’atteinte à l’intégrité physique ;
  • Les faits liés à la drogue ;
  • Les fraudes.

En ce qui concerne les vols et extorsion, les dégradations de la propriété et les faits de drogues, Mons fait bien partie des trois communes qui comptent le moins de faits par habitant. Cependant, pour ce qui est des infractions contre l’intégrité physique (5e ville sur douze) et de la fraude (4e ville sur douze), Mons se situe plutôt dans le bas du classement.

En additionnant les chiffres de ces cinq types de faits, et en divisant à nouveau le total par 10.000 habitants, Mons est la deuxième ville la plus sûre après Bruges, parmi ces douze grandes villes. Et si on insère tous les délits enregistrés, et non plus les cinq plus fréquents, Mons est la troisième ville la plus sûre après Bruges et Molenbeek-Saint-Jean.

Tout en gardant en tête la précaution que les chiffres enregistrés sont ceux de la police et sont sujets à caution, Nicolas Martin a donc raison de dire que Mons est “l’une des trois villes parmi les douze plus grandes villes du pays où on a le moins de criminalité”.

Nicolas Martin : “Une baisse de 30% à 40% de baisse de criminalité sur la mandature : les cambriolages, -70%, le vandalisme, -55%, les vols et extorsions, -60%. Les faits liés à l’intégrité physique sont en baisse également.”

Pour tenter de démontrer un bon bilan en matière de sécurité, l’actuel bourgmestre de Mons donne des chiffres, qui sont ceux de la police de la zone Mons-Quévy, mais qui concerne bien uniquement la commune (et les communes fusionnées) de Mons. Nous avons pu vérifier ces chiffres auprès de la police de Mons.

Entre 2019 et 2023, sous la mandature de Nicolas Martin donc, la criminalité globale qui tient compte de tous les délits a baissé de 12.561 faits à 9766, soit une baisse de 22,25%. La population n’ayant quasiment pas bougé (-0,5%), la criminalité par 10.000 habitants donne à peu près la même baisse.

La baisse de 22,25% n’est donc pas la baisse de “30% à 40%” annoncée par Nicolas Martin. La baisse de 30% des faits de criminalité est en fait réalisée sur 10 ans, entre 2014 et 2023. Le bourgmestre de Mons a donc confondu ces deux chiffres présentés côte à côte dans un document qui nous a également été transmis.

Nicolas Martin reproduit la même erreur lorsqu’il évoque le détail :

  • -71% pour les cambriolages sur la période 2014-2023 mais -56% sur la période 2019-2023 ;
  • -53% pour les actes de vandalisme sur la période 2014-2023 mais -37% sur la période 2019-2023 ;
  • -60% pour les vols et extorsions sur la période 2014-2023 mais -42% sur la période 2019-2023 ;
  • -7% sur les atteintes à l’intégrité physique sur la période 2014-2023 et -12% sur la période 2019-2023.

Les chiffres cités par Nicolas Martin sont donc exacts mais sur une mauvaise échelle de temps (2014-2023 au lieu de la mandature 2019-2023). Néanmoins, les chiffres pris sur la mandature montrent tout de même une nette baisse pour ces différents types de faits et pour la criminalité globale.

Georges-Louis Bouchez : “Ce qui fait baisser la criminalité, ce sont les faits de cambriolages. Or partout, les cambriolages ont considérablement baissé, on parle de deux tiers de cambriolages en moins. C’est la baisse essentielle.”

En réponse à ces statistiques en baisse, Georges-Louis Bouchez oppose que la baisse de la criminalité globale à Mons s’explique par la baisse du nombre de cambriolage qu’il évalue à deux tiers. “C’est la baisse essentielle”, dit-il.

Selon des chiffres obtenus auprès de la police de Mons, le nombre de cambriolages a évolué de la façon suivante :

  • – 2248 faits entre 2014 et 2023 ;
  • – 1180 faits entre 2019 et 2023.

Sur la période 2014-2023, la baisse est de 71%, soit un ordre de grandeur d’environ deux tiers annoncé par Georges-Louis Bouchez qui est correct.

En revanche, le nombre de délits totaux (et non plus uniquement de cambriolages) à Mons a baissé de 4203 faits entre 2014 et 2023, et de 2795 faits entre 2019 et 2023. Dans cette baisse, les cambriolages représentent donc respectivement 53% de la baisse entre 2014 et 2023 et 42% de la baisse entre 2019 et 2023.

S’il est donc exact que la baisse des cambriolages a fortement influencé la baisse de la criminalité générale à Mons, il est faux de dire que ce qui fait baisser la criminalité, c’est la baisse des cambriolages. La criminalité aurait en effet baissé, même sans la baisse du nombre de cambriolages.

Georges-Louis Bouchez : “Regardez l’augmentation des faits de drogue. Et il ne faut pas prendre une période de deux ou trois ans, […] mais sur dix ans ou vingt ans. […] Si vous reprenez depuis les années 2000, c’est fois cinq en termes de détention de drogue. C’est fois deux en termes de faits liés à la drogue. C’est 25% de plus d’atteintes aux personnes. (“C’est faux”, répond Nicolas Martin).

Voilà l’échange qui a le plus opposé les deux candidats bourgmestres, Nicolas Martin répondant “C’est faux !”, à l’affirmation de Georges-Louis Bouchez selon laquelle les atteintes aux personnes ont augmenté de 25% depuis les années 2000. Avant cela, le chef de file de Mons en Mieux indiquait une multiplication par cinq des faits de détention de drogue entre les années 2000 et aujourd’hui, et une multiplication par deux des faits liés à la drogue.

Concernant la multiplication par cinq des faits de détention de drogue, elle est confirmée par les statistiques nationales de la police concernant la commune de Mons. Ces tableaux indiquent que la détention de drogue a bien été multipliée par cinq passant de 116 faits en 2000 à 504 en 2023. Cependant, comme indiqué ci-dessus, ces chiffres sont avant tout le reflet de l’activité policière et reflètent probablement, en partie, les priorités données par les parquets et les zones de police. C’est un fait que depuis plusieurs années, la lutte contre la drogue est devenue une priorité du plan national de sécurité. Dans son plan zonal, la ville de Mons a également fait de la lutte contre les stupéfiants une priorité. Des moyens policiers y ont été alloués. La création de la brigade Pumas en septembre 2019, dont le but est de sécuriser le quartier de la gare de Mons avec un focus spécifique sur le trafic de drogue, a certainement également influencé les chiffres à la hausse.

Georges-Louis Bouchez pointe ensuite l’ensemble des faits de drogue, et non plus la simple détention, qui auraient été multipliés par deux en 20 ans. À nouveau, le constat est juste avec 307 faits en 2000 contre 607 en 2023. Comme nous le voyons dans le tableau ci-dessous, la hausse du nombre de faits totaux est plus faible que la seule ligne “détention” car le nombre d’infractions liées à “l’usage” a quasiment disparu des statistiques. Il est par ailleurs peu probable que l’usage de drogue ait, dans la réalité, baissé dans les mêmes proportions, ce qui illustre à nouveau le phénomène du “chiffre noir”.

Dans le détail, ce qui fait augmenter considérablement l’ensemble des faits liés à la drogue, c’est l’augmentation des PV dressés pour détention de stupéfiants, et pas les activités liées au commerce qui sont stables depuis 2018. Pour les raisons déjà évoquées, l’augmentation du nombre de PV enregistrés pour détention est en partie, mais pas uniquement, expliquée par la logique “plus on cherche, plus on trouve”, et donc à une intensification des contrôles policiers.

© RTBF

Enfin, le chef de file de “Mons en mieux” pointe encore une augmentation de 25% des atteintes aux personnes. Là encore, lorsqu’on consulte les statistiques de la police fédérale, le constat est juste. Entre 2000 et 2023, les coups et blessures – qui constituent les principales atteintes à l’intégrité physique – ont bien augmenté de 25,38%. Un chiffre qu’il est intéressant de mettre en perspective avec le constat au niveau national : + 35,8% sur la même période de référence.

En tenant compte des précautions indiquées, Georges-Louis Bouchez a donc raison sur la multiplication par cinq des faits de détention de drogue, par deux des faits liés à la drogue en général et l’augmentation de 25% des atteintes aux personnes entre 2000 et 2023 à Mons.

Georges-Louis Bouchez : “Nous sommes la ville de Wallonie avec le moins de caméras de surveillance. 500 flux à Namur, plus de 340 à Charleroi, 270 à Liège, 71 à Mons.”

Au cours du débat, Nicolas Martin est le premier à évoquer le sujet du nombre de caméras de surveillance. “Elles sont passées de 18 à 77” sur la mandature indique-t-il, après avoir précisé que “les caméras, c’est bien mais ça ne résout pas les problèmes d’insécurité sur le terrain”. Pour le chef de file de Mons en Mieux, il manque des caméras à Mons, surtout en regard du nombre de caméras installées dans les autres grandes villes de Wallonie : “500 flux à Namur, plus de 340 à Charleroi, 270 à Liège, 71 à Mons.”

Il n’existe pas de banque de données accessibles permettant de vérifier ces chiffres. Nos demandes auprès des services de l’Intérieur et de la police n’ont pas abouti. Nous ne pouvons nous baser que sur les chiffres donnés par les autorités communales ou les zones de police locale à la presse.

Ainsi, à Namur, le bourgmestre Maxime Prévot évoquait le chiffre de “400 flux” de caméra il y a quelques jours chez nos confrères de RTL Info, soit 100 de moins que le chiffre évoqué par Georges-Louis Bouchez. Ce chiffre de 400 est aussi avancé par la zone de police namuroise dans un article de la RTBF.

À Charleroi, la zone de police citait, dans un article de la Dernière Heure, le chiffre de 340 caméras de surveillance en avril dernier. À Liège, un article du mois de juillet de SudInfo, donnait le chiffre de 252 caméras installées et ajoutait que dix autres seraient bientôt ajoutées. Enfin, à Mons, un article récent de Soir indiquait une “septentaine” de caméras de surveillance, soit dans les ordres de grandeurs évoqués par Georges-Louis Bouchez (71) et Nicolas Martin (77).

Le chef de file de Mons en Mieux a donc raison lorsqu’il indique que parmi les quatre grandes villes de Wallonie, Mons est celle qui a le moins de caméras de surveillance installées. Les chiffres cités concernant les autres villes sont plutôt corrects.

Georges-Louis Bouchez : “Nous avons plus d’actes de délinquance par 10.000 habitants qu’à La Louvière, qu’à Molenbeek”

Dans le débat, Georges-Louis Bouchez compare Mons aux communes de La Louvière et de Molenbeek en nombre de faits de criminalité divisés par 10.000 habitants. Si à nouveau, il faut tempérer l’importance des statistiques policières qui dépendent de l’activité de la police (ses moyens, ses ambitions, son efficacité) et des priorités données par le parquet ou la zone, nous pouvons vérifier cette comparaison de Georges-Louis Bouchez.

Ainsi, selon la rubrique “statistiques” du site de la police fédérale, on a compté en 2023 :

Le site de la police précise que les délits enregistrés dans ce décompte sont ceux qui se trouvent dans le “top 15 des catégories principales au niveau national”. Le décompte n’est donc pas exhaustif.

En divisant ces chiffres par 10.000 habitants (selon les décomptes de population de Statbel au 1er janvier 2024), cela donne les résultats suivants.

  • Mons : 1013 délits par 10.000 habitants
  • La Louvière : 823 délits par 10.000 habitants.
  • Molenbeek-Saint-Jean : 994 délits par 10.000 habitants.

En comparaison avec ces deux communes, il s’avère que Mons enregistre moins de vols et d’extorsion par habitant que Molenbeek, mais davantage que La Louvière, moins d’infractions contre l’intégrité physique que La Louvière mais davantage que Molenbeek, moins de dégradations de la propriété que les deux autres communes, moins de faits de drogue que Molenbeek mais davantage que La Louvière.

En revanche, les cas de fraude, de criminalité informatique ou d’infractions contre la sécurité publique ou contre la législation sur les étrangers sont plus élevés, par habitant, à Mons que les dans les deux autres communes comparées.

Tout en gardant à l’esprit la précaution à avoir sur l’enregistrement des faits policiers, Georges-Louis Bouchez a raison de dire qu’il y a plus d’actes de délinquance par 10.000 habitants à Mons qu’à La Louvière et Molenbeek. Les faits criminels plus nombreux à Mons que dans les deux autres communes sont notamment ceux qui concernent la fraude, la criminalité informatique ou la législation sur les étrangers.

Ce qu’il faut retenir

  • La criminalité est difficile à objectiver sur base des seuls chiffres policiers étant donné le “chiffre noir” de la criminalité, les changements de priorités policières et des méthodes policières qui elles-mêmes évoluent avec le temps.
  • Il ne faut pas conclure non plus qu’une hausse de la criminalité induit forcément une hausse du sentiment d’insécurité. L’insécurité est un sentiment qui peut être nourri par notre environnement (insalubrité, éclairage public) et notre confrontation à des images, des vidéos et discours violents.
  • Mons faisait bien partie, comme l’indiquait Nicolas Martin, des trois villes parmi les douze grandes villes du pays où on dénombre le moins de délits par 10.000 habitants en 2023.
  • A Mons, la baisse de la criminalité est de 22% entre 2019 et 2023, et non de 30%. La baisse de 30% se constate sur la période 2014-2023. Les chiffres de cambriolages, de vandalisme, de vols et extorsions et faits liés à l’intégrité physique sont en baisse, mais dans des proportions moindres que celles avancées par le bourgmestre.
  • S’il est exact que la baisse des cambriolages a fortement influencé la baisse de la criminalité générale à Mons, il est faux de dire que ce qui fait baisser la criminalité, c’est la baisse des cambriolages car la criminalité a aussi baissé par ailleurs. La baisse des cambriolages représente entre 42% et 53% de la baisse de la criminalité globale.
  • Entre 2000 et 2023, le nombre de faits liés à la détention de drogue a été multiplié par cinq, le nombre de faits globaux liés à la drogue a été multiplié par deux, comme l’indiquait Georges-Louis Bouchez. Ces chiffres ont, au moins en partie, pu être influencés par l’effet “plus on cherche, plus on trouve”. On dénombre également une augmentation de 25% des atteintes aux personnes.
  • La ville de Mons est bien la grande ville de Wallonie qui compte le moins de caméras de surveillance sur sa zone (environ 70) contre 400 à Namur, 340 à Charleroi, et environ 260 à Liège, comme l’annonçait Georges-Louis Bouchez.
  • Comme l’indiquait aussi le chef de file de Mons en Mieux, on compte davantage de délits par 10.000 habitants que La Louvière ou Molenbeek-Saint-Jean, surtout en matière de fraude, de criminalité informatique ou de législation sur les étrangers.