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Cette photo ne montre pas des Amérindiens défiler en soutien aux “camionneurs pour la liberté”

Cette photo ne montre pas des Amérindiens défiler en soutien aux "camionneurs pour la liberté" - Featured image

Author(s): Marie Genries, Julien NGUYEN DANG, AFP Belgique, AFP France

Une publication partagée plus de 1 400 fois depuis le 4 février prétend montrer des Amérindiens qui défilent en soutien au mouvement des convois dits “de la liberté” contre la vaccination obligatoire, initié au Canada avant de s’étendre à plusieurs pays. C’est faux: cette photo montre en réalité une parade dans la réserve indienne de Banff en 1960.

Le mouvement des convois dits “de la liberté”, qui a débuté fin janvier à Ottawa (Canada) pour protester contre les mesures sanitaires et la vaccination obligatoire, a inspiré des mouvements similaires dans plusieurs pays européens, dont la France et la Belgique. Sur Facebook, une photo partagée 1 400 fois depuis le 4 février 2022 prétend montrer “les vrais propriétaires des terres américaines” défiler “en soutien aux camionneurs pour la liberté”.

Capture d’écran réalisée le 14/02/2022 sur Facebook

Dans les commentaires, certains internautes s’interrogent sur l’origine de la photo, signalant qu’elle “semble ancienne” ou qu’elle “date au moins des années 1950”. L’un d’entre eux mentionne le Stampede de Calgary, un festival qui se tient tous les ans pour présenter la culture autochtone.

 

 

 

Captures d’écran réalisées le 14/02/2022 sur Facebook

 

Une recherche inversée à partir de l’image permet de retrouver un lien vers le site des archives du gouvernement canadien ainsi qu’un autre lien vers un site Pinterest, qui renvoie vers une page officielle qui ne fonctionne plus.

Cependant, en tapant des mots-clés apparaissant dans l’URL de la page cassée dans une barre de recherche Google, on retrouve une nouvelle page sur le site du gouvernement canadien qui partage la photo recherchée avec ce titre: “Parade lors des jours de festivités indiennes à Banff [L’homme menant le défilé a été identifié comme étant le chef Walking Buffalo ou Tatânga Mânî, ou George McLean, chef de la Première nation Stoney Nakoda, près de Morley (Alberta)]”.

La photo est datée de juillet 1960.

 

Capture d’écran réalisée sur le site du gouvernement canadien le 14/02/2022

 

Sur son site, l’Encyclopédie canadienne explique que Walking Buffalo, ou Tatanga Mani, est né en 1870 et décédé en 1967 à Banff, en Alberta, dans le sud-ouest du Canada. Leader autochtone, il a été le chef de la Première nation (un terme utilisé pour désigner les populations autochtones du Canada) de Bearspaw, en Alberta. “Walking Buffalo s’implique activement dans les Journées indiennes à Banff et le Stampede de Calgary, où il présente fièrement la culture des Stoney-Nakodas”, écrit l’auteur de l’article de cette encyclopédie.

Les journées indiennes de Banff sont décrites notamment dans ce papier de recherche publié en 2015. L’auteur indique que ce festival, qui s’est tenu annuellement entre 1910 et 1972, a “renforcé les images temporalisées et exotisées des peuples indigènes locaux et contribué à la production de l'”indigénéité””. Lors de ces journées, les visiteurs pouvaient notamment découvrir “les pratiques sportives et culturelles des peuples autochtones locaux”.

D’autres photos de ces journées peuvent être trouvées en ligne, par exemple sur le site du Musée d’histoire sociale de Montréal qui indique que chaque année, la réserve de Morley, près de Banff, “organise un des événements les plus courus de la région, le Indian Day, une journée spéciale au cours de laquelle des sports, des courses, etc. sont organisés”.

Pas de soutien officiel aux convois

Le mouvement des convois anti-restrictions sanitaires né au Canada fin janvier 2022 n’a pas été officiellement soutenu par des organisations autochtones du pays.

L’une des figures de proue du mouvement, Tamara Lich, revendique un héritage Métis – un peuple du Canada descendant à la fois des Européens et des Premières nations.

Des médias canadiens ont également rapporté des références à la culture autochtone par plusieurs participants aux convois dits “de la liberté”: certains ont par exemple organisé une cérémonie du calumet, d’autres ont utilisé une pipe cérémoniale ou un tipi. L’utilisation de ces objets sans permission a été condamnée par des organisations autochtones.

Le 7 février 2022, l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL) a demandé le “retrait immédiat du convoi de camionneurs du Parc de la Confédération (Ottawa)”, dénonçant des “activités cérémoniales” réalisées sur un “territoire traditionnel non-cédé”.

Les convois de camions et autres véhicules contre les restrictions liées au Covid-19 ont fait l’objet de plusieurs vérifications de l’AFP, ici et ici par exemple.

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Ce fact-check a été également publié par https://hosting.afp.com.