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Elections 2024 : nous avons vérifié 20 affirmations de Magnette, Bouchez, Hedebouw, Nollet, Prévot et De Smet sur le pouvoir d’achat

Elections 2024 : nous avons vérifié 20 affirmations de Magnette, Bouchez, Hedebouw, Nollet, Prévot et De Smet sur le pouvoir d’achat - Featured image

Author(s): Guillaume Woelfle

Les six présidents de partis francophones représentés au Parlement ont pu débattre ce mercredi 13 mars dans le débat de QR consacré au pouvoir d’achat. La cellule Faky de la RTBF a réécouté attentivement le débat pour vérifier les affirmations des représentants politiques.

Nous avons sélectionné au total vingt affirmations prononcées au cours de ce débat en excluant celles qui étaient imprécises (contenant des formules telles que “bien souvent”, “parfois”, “certaines personnes”…). Nous avons aussi écarté les propositions et les projections telles que “si nous faisions ceci, nous aurions cela” puisque ces projections reposent généralement sur des hypothèses et pas uniquement des faits.

Enfin, tant que faire se peut, nous avons tenté d’égaliser le nombre de vérifications même si certains présidents ont prononcé davantage d’affirmations précises tandis que d’autres ont formulé davantage de propositions difficilement vérifiables. Dès lors, davantage d’affirmations sont vérifiées pour Georges-Louis Bouchez (7 au total) que pour Maxime Prévot (1), François De Smet ou Jean-Marc Nollet (2 chacun).

20 affirmations des présidents de partis sur le pouvoir d’achat

Cliquez sur le chapitre de votre choix pour y accéder directement
  1. RTBF : “Entre 2021 et 2023, le risque de pauvreté a bondi de 12,7% à 18,6%”
  2. Georges-Louis Bouchez : “On est dans le top trois de la fiscalité sur le patrimoine”
  3. François De Smet : “Notre pays est champion du monde de la taxation sur le travail”
  4. Raoul Hedebouw : “30% ou 40% d’impôt si vous êtes un salarié mais si vous faites des plus-values sur actions, c’est 0%”
  5. Georges-Louis Bouchez : “Nous avons un des niveaux de dépenses publiques les plus élevés. […] L’équivalent de 55% de notre PIB, c’est de la dépense publique”
  6. Raoul Hedebouw : “Les marges bénéficiaires des entreprises (en Belgique) n’ont jamais été aussi élevées qu’aujourd’hui : 44%.”
  7. Georges-Louis Bouchez : “Le taux d’activité s’est moins amélioré que dans le reste de l’Europe, et c’était grâce au vieillissement”
  8. Paul Magnette : “Nous avons relevé le salaire minimum et nous avons créé 300.000 emplois. On n’avait jamais créé autant d’emplois, et on approche de l’objectif qu’on s’est fixé ensemble”
  9. Jean-Marc Nollet : “Tinne Van der Straeten a élargi l’accès au tarif social énergie à un million de Belges supplémentaires. Ce tarif social énergie permet une réduction de facture de 70% pendant les périodes de crise”
  10. Raoul Hedebouw :”On a calculé que la perte en salaire réel pendant la Vivaldi a été, cumulée, de 3000€”
  11. Georges-Louis Bouchez : “On fait partie des cinq pays européens avec le plus faible taux d’emploi”
  12. Georges-Louis Bouchez : “La Wallonie a 12 points de moins de taux d’emploi que la Flandre”
  13. François De Smet : “Le taux d’emploi en Région bruxelloise était de 58% […], il est de 68% aujourd’hui. Le taux de chômage était de 18%, nous l’avons ramené à 11%”
  14. Paul Magnette : “On a sanctionné 25.000 personnes (dans le cadre du chômage)”
  15. Maxime Prévot : “Il y a plus de personnes en incapacité de travail qu’au chômage”
  16. Georges-Louis Bouchez : “La Belgique a une moyenne plus élevée que la moyenne européenne, on a 1,6 point en plus de maladie-invalidité que la moyenne européenne”
  17. Paul Magnette : “Le salaire médian en Belgique a augmenté de 250 € ces dernières années”
  18. Georges-Louis Bouchez : “Sur un caddie de 100€, le bénéfice pour l’entreprise de grande distribution est de 0,90€”
  19. Raoul Hedebouw : “La ville de Vienne a 60% de logements publics et sociaux.”
  20. Jean-Marc Nollet : “Il y a 20.000 logements vides à Bruxelles et 100.000 en Wallonie”

RTBF : “Entre 2021 et 2023, le risque de pauvreté a bondi de 12,7% à 18,6%”

Faux.

La première affirmation que nous vérifions provient… de la RTBF elle-même. Lors de l’introduction du débat, nous avons affirmé qu’”entre 2021 et 2023, le risque de pauvreté a bondi de 12,7 à 18,6%”.

Pour arriver à ce chiffre, la RTBF a consulté Statbel, l’office belge de statistique, qui indiquait début février que 18,6% de la population belge courait un risque de pauvreté ou d’exclusion sociale (abrévié en AROPE), ce chiffre-là est donc juste.

L’équipe de QR a ensuite cherché à comparer ces statistiques avec celles des années précédentes, mais en cherchant, l’équipe a confondu deux indicateurs :

  • le risque de pauvreté monétaire (abrévié en AROP, sans “E” à la fin) dont le taux de 2021 était de 12,7%.
  • le risque de pauvreté ou d’exclusion sociale (AROPE, avec un “E”) dont le taux de 2021 était de 18,8%, soit quasiment au même niveau qu’en 2023.

Depuis 2015, ce risque de pauvreté ou d’exclusion sociales (AROPE) a légèrement baissé en Belgique, comme le montre ce graphique, même s’il faut tenir compte d’une rupture statistique en 2019 en raison de changements de méthodologie.

La RTBF présente ses excuses pour cette erreur qui sera corrigée également sur antenne lors du débat de QR du 20 mars, comme le prévoit notre déontologie.

Georges-Louis Bouchez : “On est dans le top trois de la fiscalité sur le patrimoine”

Faux.

Dans le débat sur une réforme fiscale, alors que PTB, Ecolo et PS souhaitent taxer davantage le capital pour réduire la taxation sur le travail, Georges-Louis Bouchez répond qu’en Belgique, “on est dans le top trois de la fiscalité sur le patrimoine”, indiquant par là que le capital est déjà assez taxé.

Une taxation sur le capital est compliquée à comparer entre pays car cela ne dépend pas d’une seule taxe mais potentiellement de plusieurs prélèvements mis bout à bout. Cela peut inclure une taxation sur des loyers perçus par un propriétaire, une taxe foncière, une taxe sur une succession, sur une plus-value boursière ou lors de l’achat d’un bien immobilier.

Et les taux peuvent fortement varier d’un pays à l’autre ou d’une région à l’autre. La Belgique, par exemple, ne taxe pas du tout les plus-values boursières ou les loyers perçus par un propriétaire. On peut distinguer la taxation du capital lui-même qui existe en Belgique sous différentes formes (taxe foncière, succession, droits d’enregistrement) et la taxation des revenus générés par le capital qui est plus faible dans notre pays comme l’indiquait cet article de l’Echo.

Pour faire le total de ces différentes taxes, l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques, analyse les niveaux de taxation du patrimoine de ses pays en comparant les revenus de taxation au PIB de chaque pays. L’organisation en conclut qu’en 2022, la Belgique occupait le 7e rang sur 37 des pays de l’OCDE qui taxent le plus le patrimoine. L’affirmation de Georges-Louis Bouchez n’est donc pas correcte. Les mêmes chiffres de l’OCDE, mais de 2021, classaient la Belgique en troisième position comme le rapportaient nos confrères de La Libre.

François De Smet : “Notre pays est champion du monde de la taxation sur le travail”

Vrai.

Pour améliorer le niveau des salaires, le président de DéFI, François De Smet propose une réforme fiscale, partant du constat que “notre pays est champion du monde de la taxation sur le travail”. Georges-Louis Bouchez (MR) prononcera les mêmes mots quelques minutes plus tard.

L’étude la plus souvent citée dans la presse ici ou  fait référence à cette étude de l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques, qui compare le “coin fiscal” sur le salaire dans 38 pays européens et non européens en 2022. Le coin fiscal est la partie payée par l’employeur pour son employé qui ne va pas finalement dans la poche du travailleur.

Selon l’OCDE, ce coin fiscal est le plus élevé en Belgique parmi tous les pays de l’OCDE pour le salarié célibataire au salaire moyen, avec 53% du coût de main-d’œuvre qui part en cotisations et impôts. Ceci veut dire que 47% de ce que débourse l’employeur arrive finalement en net chez le travailleur.

Dans la limite des études disponibles (il s’agit d’une comparaison entre 38 pays et non tous les pays du monde), l’affirmation de François De Smet et de Georges-Louis Bouchez est donc correcte.

Raoul Hedebouw : “30% ou 40% d’impôt si vous êtes un salarié mais si vous faites des plus-values sur actions, c’est 0%”

Vrai.

Le président du PTB n’est pas le seul à l’avoir pointé au cours du débat, Maxime Prévot (Les Engagés) et Jean-Marc Nollet (Ecolo) l’ont fait aussi : il existe une différence de taxation entre le travail et les plus-values d’action. “Aujourd’hui, vous allez payer 30% ou 40% d’impôt si vous êtes un salarié mais si vous faites des plus-values sur actions, c’est 0% d’impôt”, a affirmé Raoul Hedebouw.

Concernant la première partie de la phrase, il est exact de dire que les revenus sur le travail peuvent être taxés à 30% ou 40% puisque les barèmes fiscaux belges peuvent monter jusqu’à 50% en fonction des revenus. Ainsi, une personne qui perçoit plus 26.000€ brut imposables (donc après cotisations sociales) par an, soit 2165€ par mois, atteindra la tranche de 40%. Notons que, selon Statbel, le salaire médian des Belges était de 3507€ par mois, donc une large partie de la population atteint cette tranche de 40% d’impôts.

En ce qui concerne les plus-values sur actions, il n’existe en effet pas de taxe spécifique qui s’applique en Belgique. Mais comme nous l’avons vu ci-dessus, cela ne veut pas dire que les revenus du capital ne sont pas du tout taxés. Cela ne signifie pas non plus que l’argent investi en bourse n’est jamais taxé.

Nous pouvons citer trois taxes qui touchent l’argent placé en bourse :

Raoul Hedebouw, Jean-Marc Nollet et Maxime Prévot ont donc raison lorsqu’ils indiquent que les plus-values ne sont pas taxées en Belgique.

Georges-Louis Bouchez : “Nous avons un des niveaux de dépenses publiques les plus élevés. […] L’équivalent de 55% de notre PIB, c’est de la dépense publique”

Plutôt vrai.

Le président du MR l’a affirmé à trois reprises au cours du débat : “Nous avons un des niveaux de dépenses publiques les plus élevés dans le monde”, a-t-il dit avant de préciser que “l’équivalent de 55% de notre PIB, c’est de la dépense publique”, en reprochant à ses cinq collègues présidents de parti de vouloir “prendre l’argent des gens” au lieu de “dépenser mieux l’argent qu’ils ont déjà aujourd’hui”. Ainsi, plaide Georges-Louis Bouchez pour ne pas augmenter l’impôt en Belgique.

L’Organisme de coopération et de développement économiques (OCDE) compare les niveaux de dépenses des administrations publiques en fonction du PIB. Selon les derniers chiffres disponibles, ceux de 2022, la Belgique occupait le troisième rang des pays qui ont la plus grande dépense publique en pourcentage de leur PIB (53,5%), juste derrière la France (58,1%) et l’Italie (56,7%), un peu au-dessus de la moyenne des pays européens de l’OCDE (50%).

L’affirmation de Georges-Louis Bouchez était donc correcte et son chiffre quasiment exact.

Précisons enfin, comme l’a correctement fait Georges-Louis Bouchez, qu’il s’agit bien d’une équivalence entre des dépenses publiques et le PIB, mais que l’État ne dépense pas le PIB lui-même. Le PIB est en effet la somme des richesses produites dans l’ensemble du pays et tout ce PIB ne revient pas intégralement à l’État en impôts, loin de là. Pour comparer la hauteur des dépenses publiques, les autorités ont pour coutume de la comparer avec le PIB, mais elle pourrait être comparée aussi à d’autres indicateurs.

Raoul Hedebouw : “Les marges bénéficiaires des entreprises (en Belgique) n’ont jamais été aussi élevées qu’aujourd’hui : 44%”

Plutôt vrai.

C’est l’une des priorités du PTB, Raoul Hedebouw propose d’abroger la “Loi de 96 sur la compétitivité” qui réduit les marges de négociations d’augmentation des salaires en fonction de l’évolution des salaires des pays qui nous entourent (Allemagne, France, Pays-Bas). Pour Raoul Hedebouw, augmenter les salaires serait tout à fait possible car assure-t-il, “les marges bénéficiaires des entreprises (en Belgique) n’ont jamais été aussi élevées qu’aujourd’hui : 44%.”

Le chiffre cité par Raoul Hedebouw pourrait être basé sur un rapport de novembre 2023 de la Banque nationale de Belgique sur l’évolution des marges bénéficiaires des entreprises et l’inflation. Dans ce rapport, il est effectivement indiqué les marges bénéficiaires brutes des entreprises en 2022 (derniers chiffres disponibles) était de 43,8%, légèrement en baisse par rapport à 2021 (44,2%). Le taux de 2021 n’a jamais été aussi élevé, selon les chiffres de la Banque nationale qui remontent jusqu’à 1995.

Cette marge brute de 44% indique sur un produit de 100€ vendu par une entreprise, 44€ sont du bénéfice brut. Il faut alors déduire d’autres coûts, comme les impôts, pour arriver à la marge bénéficiaire nette des entreprises. Selon le même rapport de la Banque nationale, ce taux atteint 29,6% en 2022, un record depuis 1995.

Raoul Hedebouw avait donc raison sur le chiffre et sur le fait qu’il s’agisse d’un record, mais en gardant en tête qu’il s’agit d’une marge brute, et non d’une marge nette.

Georges-Louis Bouchez : “Le taux d’activité s’est moins amélioré que dans le reste de l’Europe, et c’était grâce au vieillissement”

Vrai et faux.

Au milieu du débat, Georges-Louis Bouchez et Paul Magnette se sont livrés une passe d’armes au sujet du bilan à la tête du ministère du Travail et de l’Emploi de Pierre-Yves Demargne, ministre socialiste. Pour Georges-Louis Bouchez, “ils (les socialistes) vont vous expliquer que le taux d’activité s’est amélioré, mais il s’est moins amélioré que dans le reste de l’Europe, et il s’est amélioré grâce au vieillissement, c’est un phénomène purement mécanique.”

Le premier élément à prendre en compte ici est que Georges-Louis Bouchez ne parle pas de taux d’emploi, mais de taux d’activité. Le taux d’emploi représente la part de la population de 20-64 ans qui est à l’emploi (72,1% en 2023). Or, le taux d’activité représente la part de la population de 20-64 ans qui est à l’emploi ou au chômage, mais qui souhaite participer au marché du travail (76,1% en 2023). Ce taux d’activité était de 74% en 2020, donc il a augmenté de 2,1% en trois ans de Vivaldi.

Ce taux d’activité a-t-il davantage progressé dans le reste de l’Europe qu’en Belgique ? Les chiffres d’Eurostat rassemblent à un seul endroit les taux d’activités annuels de tous les pays d’Europe pour les 20-64 ans. Nous avons pu faire la différence entre le taux de 2020 et celui de 2023 pour chaque pays et on constate que la Belgique, avec une progression de +2,3 points (selon Eurostat, le taux d’activité belge était de 73,8% et non 74% comme Statbel), se trouve dans le ventre mou européen, sous la moyenne européenne de +2,9 points. Parmi nos voisins, seule l’Allemagne a fait mieux (+2,6 points) mais les Pays-Bas (+1,8 point), la France (+1,8 point) et le Luxembourg (1,4 point) ont moins bien performé que la Belgique.

Georges-Louis Bouchez a donc raison lorsqu’il indique que le taux d’activité belge a moins progressé que le reste de l’Europe, si on tient compte de la progression moyenne des 27 pays de l’Union européenne.

Enfin, le taux d’activité belge s’est-il amélioré de façon “purement mécanique”, grâce au vieillissement ? Cette affirmation sous-entend que grâce au papy-boom, de nombreux inactifs (ni à l’emploi, ni à la recherche d’un emploi) ont basculé naturellement vers la pension, ce qui a fait mécaniquement baisser le taux d’inactivité et donc augmenter le taux d’activité.

Pour le vérifier, il s’agit de voir si en chiffres absolus, il y a davantage de personnes actives en 2023 qu’en 2020, ce qui signifierait que malgré le papy-boom, il y a bien davantage d’actifs en 2023. Sur ce point, les données de Statbel sont claires, nous comptions 4,95 millions d’actifs en Belgique en 2020 et 5,15 millions en 2023, soit 200.000 actifs en plus malgré le papy-boom. Un chiffre qui progresse d’année en année. Georges-Louis Bouchez a donc tort sur ce point-là.

Paul Magnette : “Nous avons relevé le salaire minimum et nous avons créé 300.000 emplois. On n’avait jamais créé autant d’emplois, et on approche de l’objectif qu’on s’est fixé ensemble”

Vrai, faux, vrai et faux.

Le président du PS, Paul Magnette a défendu le ministre du Travail et de l’Emploi, Pierre-Yves Dermagne (PS) face aux critiques de Georges-Louis Bouchez par ces mots : “Le bilan de Pierre-Yves Dermagne, ministre du Travail, c’est que nous avons pu relever le salaire minimum. Nous avons pu créer sous cette législature 300.000 emplois. On n’avait jamais créé autant d’emplois. Et on approche de l’objectif qu’on s’est fixé ensemble (80% de taux d’emploi en 2030, ndlr).”

En Belgique, le salaire minimum s’appelle le “Revenu minimum mensuel moyen garanti” (RMMMG) et s’applique aux travailleurs qui ne font partie d’aucune commission paritaire (dont les salaires minimums sont alors plus élevés). Il est exact de dire que ce salaire minimum a augmenté. Il est passé de 1625,72€ bruts en 2020 avant l’entrée en fonction du gouvernement De Croo à 1994,18€ bruts aujourd’hui. Selon le SPF Emploi, cette augmentation est due à huit indexations automatiques des salaires de 2% et à une augmentation de 4% le 1er avril 2022. Deux autres augmentations ont été prévues par le gouvernement Vivaldi, en avril 2024 et en 2026, comme le précise ce communiqué de la ministre de l’Intégration sociale, Karine Lalieux (PS). Paul Magnette a donc raison sur ce point.

Le gouvernement a-t-il créé 300.000 emplois comme l’affirme Paul Magnette ? Plusieurs hypothèses et plusieurs façons de décompter coexistent qui peuvent être influencées par le caractère saisonnier du marché du travail. La Banque nationale de Belgique parvient à contourner cet écueil en fournissant des statistiques trimestrielles et “corrigé des variations saisonnière”. Nous les exposons ci-dessous depuis le 1er trimestre de 1995, plus ancienne date possible. Notons que les données de 2022 et 2023 sont encore provisoires.

Nous décomptons, entre le 4e trimestre de 2020 et le 4e trimestre de 2023, une différence de 226.100 emplois. Ceci colle avec les statistiques annuelles de Statbel qui indique que l’augmentation du nombre d’actifs occupés entre 2020 et 2023 est de 225.000. Nous ne pouvons donc pas conclure que le gouvernement Vivaldi ait créé 300.000 emplois comme le disait Paul Magnette.

Néanmoins, la Vivaldi a-t-il créé plus d’emplois que n’importe quel autre gouvernement ? Pour cela, nous avons calculé depuis 1995 le nombre d’emplois créés en moyenne par trimestre pour chaque gouvernement, hors période d’affaires courantes. Le résultat donné :

  • Gouvernement Vivaldi : +17.932 emplois par trimestre
  • Gouvernement Michel (2014-2018) : +14.847 emplois par trimestre
  • Gouvernement Verhofstadt II (2003-2007) : +13.889 emplois par trimestre
  • Gouvernement Dehaene II (1995-1999) : +8931 emplois par trimestre
  • Gouvernement Verhofstadt I (1999-2003) : +8569 emplois par trimestre

Les gouvernements Van Rompuy, Leterme et Di Rupo étaient en-dessous de ces chiffres. Il est donc exact de dire qu'”on n’avait jamais créé autant d’emplois” que sous la Vivaldi comme l’indiquait Paul Magnette.

Il est en revanche hautement improbable que la Belgique atteigne l’objectif de 80% de taux d’emploi en 2030, alors que le taux à fin 2023 était de 72,1%, comme l’indiquait notre article de Décrypte sur le sujet.

Jean-Marc Nollet : “Tinne Van der Straeten a élargi l’accès au tarif social énergie à un million de Belges supplémentaires. Ce tarif social énergie permet une réduction de facture de 70% pendant les périodes de crise”

Vrai.

L’augmentation des prix vécue en 2021 et 2022 par la population belge a suscité un débat sur l’éventuel blocage de prix, sur la diminution de la TVA sur l’énergie à 6% au lieu de 21%. Pour Ecolo, il existe d’autres solutions, notamment celle d’aider plus précisément ceux qui en ont vraiment besoin. Ainsi, Jean-Marc Nollet se dit “fier” que la ministre de l’Energie, Tinne Van der Straeten (Groen) ait “élargi le tarif social énergie à un million de Belges supplémentaires.” Le président d’Ecolo précise que ce tarif social “permet une réduction de facture de 70% dans les périodes de crise”.

Selon le SPF Economie cité dans cette publication de la Febeg, la Fédération belge des entreprises électriques et gazières, le nombre de ménages bénéficiant du tarif social début 2020 est passé de 425.000 à 925.000 à la fin 2021. Ceci indique que 500.000 ménages supplémentaires en ont bénéficié. Étant donné que le ménage moyen belge compte plus de deux personnes en moyenne, on peut estimer que l’élargissement du tarif social en 2020-2021 a bénéficié à un million de Belges, comme l’indique Jean-Marc Nollet (Ecolo)

Ce même rapport de la Febeg a également comparé le tarif résidentiel de gaz et d’électricité au tarif social pour ces deux produits. Lorsque les prix de l’énergie étaient au plus haut, en janvier 2022, un contrat d’un an de gaz et d’électricité pour un ménage moyen coûtaient 1352€ par an au lieu de 4513€, soit une économie de 70%. Le chiffre de Jean-Marc Nollet est donc correct.

Notons que depuis l’accalmie sur les marchés de l’énergie, les prix du gaz et de l’électricité ont chutéle tarif social n’est plus élargi et ce tarif social a augmenté.

Raoul Hedebouw : “On a calculé que la perte en salaire réel pendant la Vivaldi a été, cumulée, de 3000€”

Faux.

Pour le Parti du Travail de Belgique, l’indexation automatique des salaires n’a pas permis de protéger complètement les Belges lors des années de forte inflation en 2021 et 2022. D’après Raoul Hedebouw, il aurait fallu permettre des augmentations salariales car le PTB “a calculé que la perte en salaire réel pendant la Vivaldi a été, cumulée, de 3000€”.

Sur le site du PTB, nous en apprenons plus sur la méthodologie du calcul. Le centre d’études du Parti du Travail de Belgique a comparé l’augmentation des salaires conventionnels, en pourcentage, avec l’indice des prix à la consommation. Si les salaires augmentent plus vite que l’indice des prix à la consommation, le salaire réel augmente. À l’inverse, si l’indice des prix augmente plus vite que les salaires, le salaire réel diminue.

Le PTB a donc réalisé cette comparaison lors de chacun des 11 premiers trimestres de la Vivaldi (le dernier de 2020, les quatre de 2021 et 2022 puis les deux premiers de 2023), en additionnant les différences de salaires bruts perçus ou perdus pour un travailleur qui serait au salaire médian (3550€ bruts). Selon le PTB, ce salarié médian aurait perdu au total 3067€ brut au cours de ces onze trimestres.

La raison principale à cette perte de salaire réel au cours de ces trimestres, indique le PTB, est l’indexation des salaires qui intervient pour la plupart des travailleurs du secteur privé, une fois par an, en janvier, tout comme l’indexation des barèmes fiscaux, alors que les augmentations de prix peuvent survenir à n’importe quel moment. Ainsi, si une inflation de 5% est constatée entre janvier et avril puis qui se stabilise, ce sera une baisse de salaire réel de 5% en avril, mais aussi en mai, en juin, en juillet par rapport à janvier, jusqu’au mois de janvier suivant, quand l’indexation automatique joue son rôle. Ces “non-indexations mensuelles” sont alors perdues et jamais rattrapées.

En décembre dernier, l’économiste Philippe Defeyt de l’Institut pour un Développement Durable s’était penché sur cette étude du PTB. L’économiste, ancien mandataire Ecolo, indique comme le PTB qu’il y a eu une perte du pouvoir d’achat pendant les années de Vivaldi, mais relève plusieurs faiblesses dans le raisonnement du parti.

D’abord, pointe-t-il, la perte de pouvoir d’achat est mécanique lors des années de forte inflation, comme nous l’expliquions ci-dessus. Mais le gouvernement n’y est pour rien, “même s’il faudrait réformer l’indexation automatique des salaires et des barèmes fiscaux pour réduire cet effet retard dans l’indexation”, explique Philippe Defeyt.

En revanche, l’étude du Parti du Travail de Belgique commet plusieurs erreurs méthodologiques qui surestiment le résultat final selon l’économiste. D’une part, elle estime que la perte de 3000€ de salaire brut (pour autant que ce chiffre soit juste) est une perte de “salaire réel”. Or, si c’est du brut, cela ne peut pas être du salaire “réel” puisque ces 3000€ de salaire non perçus auraient été soumis à des prélèvements de cotisations sociales et impôts. Pour Philippe Defeyt, “on peut au moins réduire ces 3000€ de pertes de 40% de retenues”. Dès lors, pour autant que le calcul soit juste, il n’y aurait que 1800€ de pertes en net.

Ensuite, pointe l’ancien président du CPAS de Namur, le PTB retient des hypothèses favorables à leur calcul : “ils prennent l’hypothèse d’un salarié à temps plein, du secteur privé, dans une entreprise de plus de 10 personnes et donc en excluant le secteur public et l’enseignement”. Or le secteur public est indexé immédiatement, les travailleurs à temps partiel sont moins payés à l’heure, tout comme les employés des petites entreprises. Bref, les hypothèses choisies par le PTB sont toutes favorables à ce qu’il y ait la plus grande perte possible au final.

Par ailleurs, si l’on parle de pouvoir d’achat, il faut tenir compte des chèques énergie de 196€ versés cinq fois par le gouvernement au plus fort de la crise, soit 980€ de pouvoir d’achat en plus par ménage.

Philippe Defeyt indique cependant que la différence aurait été encore plus grande si le PTB avait choisi le revenu moyen et non le salaire médian dans ses hypothèses. L’économiste a donc, de son côté, refait le calcul et estime à 1869€ net la perte moyenne pendant la Vivaldi. L’affirmation de Raoul Hedebouw est donc exagérée compte tenu des remarques et du calcul de l’économiste Philippe Defeyt.

Georges-Louis Bouchez : “On fait partie des cinq pays européens avec le plus faible taux d’emploi”

Vrai.

Pour expliquer les problèmes de revenus des Belges ou de pouvoir d’achat, Georges-Louis Bouchez a voulu pointer un trop faible nombre de Belges qui sont à l’emploi. Selon le président du MR, “on fait partie des cinq pays européens avec le plus faible taux d’emploi.”

Ce taux d’emploi, en 2023, était de 72,1%, soit en légère hausse par rapport à 2022, à 71,9% de moyenne sur l’année. La plateforme européenne Eurostat ne compare encore que les chiffres de 2022 et elle indique que la Belgique a le sixième plus mauvais taux d’emploi de l’Union européenne. Notre pays est uniquement précédé par l’Italie, la Grèce, la Roumanie, l’Espagne et la Croatie.

Cependant, il est plus judicieux de regarder le taux d’emploi par équivalent temps plein qui tient compte de l’occupation des gens à l’emploi. Car de fait, une personne qui travaille quatre heures par semaine est considérée “à l’emploi” mais additionner des milliers de personnes à l’emploi pour 4h/semaine ferait augmenter artificiellement le taux d’emploi. Dès lors, selon le taux d’emploi par équivalent temps plein en 2021, la Belgique avait bel et bien le 5e plus mauvais taux, comme l’indiquait Georges-Louis Bouchez.

Georges-Louis Bouchez : “La Wallonie a 12 points de moins de taux d’emploi que la Flandre”

Plutôt vrai.

Le président du MR a critiqué le manque d’activation des demandeurs d’emploi et en veut pour preuve la différence de taux d’emploi entre la Flandre et la Wallonie. Selon Georges-Louis Bouchez, “il n’est pas normal qu’en Wallonie, nous ayons 12 points de moins de taux d’emploi que la Flandre.”

Selon les derniers chiffres de Statbel qui sont sortis le jour du débat, le taux d’emploi en Flandre était de 76,8% en 2023 contre 65,5% en Wallonie, soit un différentiel de 11,3 points.

L’affirmation de Georges-Louis Bouchez est donc plutôt vraie, même s’il aurait été plus correct d’arrondir à 11 points, plutôt que 12.

François De Smet : “Le taux d’emploi en Région bruxelloise était de 58% […], il est de 68% aujourd’hui. Le taux de chômage était de 18%, nous l’avons ramené à 11%”

Imprécis.

Selon le président De Smet, le problème principal en Belgique francophone concerne la qualification et la formation. Et d’après lui, travailler sur ces éléments permet d’améliorer le taux d’emploi et le taux de chômage.

“Il y a dix ans, en 2014, DéFI a pris le portefeuille de l’emploi et de la formation en Région bruxelloise. Nous l’exerçons depuis dix ans. En 2014, le taux d’emploi en Région bruxelloise était de 58%, […] il est de 68% aujourd’hui. De même, le taux de chômage était de 18%. Nous l’avons ramené, avec nos partenaires évidemment, à 11%.”

Le taux d’emploi à Bruxelles mesuré par l’Enquête sur les Forces de Travail par Statbel indiquait un taux d’emploi de 58,7% en 2014, il était de 66,5% en 2023 et non 68%. Le différentiel avant-après est donc de 7,8 points et non de 10 points comme l’indiquait François De Smet. Ce premier chiffre est donc légèrement surestimé.

Concernant le taux de chômage bruxellois, il était, selon Actiris, l’organisme bruxellois chargé de la politique de l’Emploi à Bruxelles, de 20,1% en moyenne sur l’année 2014. En moyenne sur l’année 2023, il a baissé à 14,7%. La baisse est donc de 5,4 points et non de 7 points comme indiqué par François De Smet.

Paul Magnette : “On a sanctionné 25.000 personnes (dans le cadre du chômage)”

Faux.

Compte-t-on en Belgique ou en Wallonie trop de chômeurs bénéficiant d’allocations sur une longue période ? Paul Magnette corrige : “Aujourd’hui déjà, on contrôle et on sanctionne. Je suis évidemment d’accord pour dire qu’un chômeur qui ne fait pas d’effort, qui ne cherche pas de travail doit être contrôlé et doit être sanctionné. On a sanctionné l’année dernière 25.000 personnes.”

Difficile de savoir si le président du PS parlait ici des sanctions de chômeurs au niveau wallon ou au niveau belge. Par ailleurs, les derniers chiffres disponibles ne datent pas de l’année dernière mais de 2022.

Ces chiffres présents dans le rapport annuel de l’Onem, page 135, indiquent qu’au niveau belge, 38.463 sanctions liées au chômage ont été prononcées, soit en raison de chômage volontaire, d’erreur administrative, de refus d’emploi convenable, de non-présentation au Forem (ou VDAB, ou Actiris) ou d’absence de recherche active d’emploi. Ceci exclut donc les avertissements et les évaluations pour les jeunes en stages d’insertion puisque Paul Magnette ne parlait que de sanctions. Sur ces 38.463 sanctions au niveau belge, 11.436 concernent des Wallons.

Dès lors, le chiffre de 25.000 personnes sanctionnées est imprécis, qu’il s’agisse du chiffre belge ou wallon.

Maxime Prévot : “Il y a plus de personnes en incapacité de travail qu’au chômage”

Vrai.

Le président des Engagés a été le premier des six responsables politiques à amener ce dossier des invalidités-maladies dans le débat : “Il faut s’atteler aussi aux enjeux des maladies”, a-t-il expliqué. Et d’ajouter : “Il y a plus de personnes aujourd’hui en incapacité de travail qu’au chômage.” Le bourgmestre de Namur a ensuite été rejoint par son collègue bourgmestre de Charleroi. “Le chômage baisse mais la maladie et l’invalidité explosent. Ils ont doublé les dix dernières années”, affirmait Paul Magnette. François De Smet pour DéFI a également affirmé qu’il y avait aujourd’hui “davantage de personnes en maladie de longue durée que de demandeurs d’emploi”.

Le nombre de personnes en invalidité-maladie n’est pas à jour. Comme l’indique cet article de la RTBF, les derniers chiffres de l’Inami datent de fin 2021 et indiquaient 485.435 invalides parmi les salariés, les demandeurs d’emploi et les indépendants. Le chiffre dépasserait probablement 500.000 personnes en ajoutant les années 2022 et 2023. Enfin, il faut y ajouter les 87.000 fonctionnaires en invalidité maladie qui ne sont pas repris par l’Inami.

Dès lors, il faut estimer à environ 600.000 le nombre de personnes en invalidité-maladie en Belgique. C’est effectivement bien davantage que les 295.000 chômeurs BIT (selon la définition du Bureau International du Travail) selon Statbel ou que les 173.000 chômeurs complets indemnisés inscrits à l’ONEM en ce mois de mars 2024. Maxime Prévot et François De Smet ont donc raison sur ce point.

Ces 600.000 personnes équivalent à 11,2% des 5,3 millions de Belges actifs en 2023. Il y a dix ans, en 2013, une proportion de 7,35% des actifs était en incapacité de travail de longue durée selon le Bureau fédéral du Plan. Cela représente cependant une augmentation de 50% et non un doublement comme l’indique Paul Magnette.

Georges-Louis Bouchez : “La Belgique a une moyenne plus élevée que la moyenne européenne, on a 1,6 point en plus de maladie-invalidité que la moyenne européenne”

Plutôt vrai.

“Il y a beaucoup de gens qui sont malades”, confirme Georges-Louis Bouchez suite aux propos de ses collègues. “Mais il y a des certificats de complaisance, il faut regarder la réalité en face”, pointe-t-il avant que Paul Magnette n’active son joker pour intervenir. Le président du PS a alors reproché au président du MR d’avoir pointé les “fraudeurs (un terme que Georges-Louis Bouchez n’a pas utilisé, ndlr) qui sont une infime minorité.” Au retour de parole chez le président du MR, celui-ci a précisé sa pensée. “En réalité, la Belgique a une moyenne plus élevée que la moyenne européenne. C’est 1,6 point en plus d’incapacité-invalidité”, avance le président du MR.

Le Steunpunt Werk, le centre de recherche politique de la KULeuven qui conseille le gouvernement flamand, indique sur base des chiffres d’Eurostat que 6,6% de la population belge de 20-64 ans était inactive pour cause de maladie ou d’invalidité contre 4,3% en moyenne dans l’Union européenne. Il y a donc un écart de 2,3 points.

Georges-Louis Bouchez avait raison sur le fait que la Belgique a une moyenne de personnes malades et en invalidité plus élevée que l’Union européenne mais il n’a pas donné le bon chiffre.

Paul Magnette : “Le salaire médian en Belgique a augmenté de 250 € ces dernières années”

Vrai.

Dans le débat sur le coût de la vie et le pouvoir d’achat, Paul Magnette a voulu insister sur l’augmentation des salaires pour contrer la hausse des prix. Le président du PS a encore défendu l’indexation automatique des salaires. Et il précise, “le salaire médian en Belgique a augmenté quand même de 250€ ces dernières années.”

Les chiffres de Statbel les plus récents datent de 2021 et indiquent ceci :

  • Le salaire mensuel brut médian est passé de 3140€ en 2017 à 3507€ en 2021, soit 367€ de plus en quatre ans.
  • Le salaire mensuel brut moyen, qui est plus élevé, est passé de 3627€ en 2017 à 3886€ en 2021, soit 259€ de plus en trois ans.

Les augmentations sont probablement encore plus grandes en 2022 et 2023 en raison des indexations de salaire plus nombreuses qu’entre 2017 et 2020. Les ordres de grandeur cités par Paul Magnette sont donc corrects, même si les chiffres sont imprécis.

Georges-Louis Bouchez : “Sur un caddie de 100€, le bénéfice pour l’entreprise de grande distribution est de 0,90€”

Vrai.

Dans le débat sur le pouvoir d’achat, Georges-Louis Bouchez a d’abord précisé que les prix n’étaient pas assez élevés pour rémunérer correctement les agriculteurs. Mais il a aussi précisé, “les grands magasins ne s’y retrouvent pas mieux. Car contrairement à ce que mes collègues aiment à dire (ils ne l’ont pas dit au cours de ce débat, ndlr), aujourd’hui sur un caddie de 100€, le bénéfice pour l’entreprise de grande distribution est de 0,90€, c’est extrêmement faible.”

Le chiffre est tout à fait exact et c’est d’ailleurs notre article de fact-checking consacré à cette question qui l’avait démontré : la marge nette de la grande distribution était de 0,91%, donc 0,91€ de bénéfice net sur un caddie de 100€, selon un rapport du SPF Economie.

Raoul Hedebouw : “La ville de Vienne a 60% de logements publics et sociaux […] le nombre de logements sociaux n’a pas augmenté mais diminué”

Vrai.

Le constat a été fait sur le plateau : les logements deviennent de plus en plus chers, notamment à Bruxelles où les prix des loyers et à l’achat progressent chaque année. Pour le président du PTB, c’est la faute au marché. “La plupart des partis traditionnels continuent à croire que le marché de l’offre et de la demande, et du business va résoudre ce problème-là, […] il faut intervenir”, dit Raoul Hedebouw.

Le PTB propose, outre une grille des loyers contraignante, l’augmentation de l’offre de logements sociaux. “On a pris comme exemple dans notre programme la ville de Vienne : 60% de logements publics et sociaux, cela met un poids fort sur les prix des loyers et à l’achat.” Enfin, le président du PTB a pointé les autres partis en indiquant que “les trente dernières années, le nombre de logements sociaux n’a pas augmenté mais diminué.” Raoul Hedebouw n’a pas précisé s’il parlait alors de la Wallonie, de Bruxelles ou de la Belgique en général.

Selon un article du journal français Le Monde publié en 2019, 62% du 1,8 million d’habitants de Vienne (soit 1,1 million) vivent dans une habitation à loyer modéré, “qu’elle soit destinée aux classes populaires ou aux classes moyennes” qui déboursaient, en 2019, entre 300€ et 750€ par mois pour se loger. Cela représente 440.000 habitations gérées ou cogérées par la ville.

Un autre chiffre plus récent, cité par Euronews cette fois, indique qu’”environ 50% des biens immobiliers résidentiels de la ville” sont gérés par le conseil municipal, en tant que propriétaire ou copropriétaire. Selon Euronews, “environ un million de personnes, soit à peu près la moitié de la population viennoise, vivent dans des appartements sociaux”.

Le chiffre cité par Raoul Hedebouw sur la proportion de logements sociaux à Vienne est donc correct.

Quant au nombre de logements sociaux en Belgique, nous avons pu reconstituer le nombre depuis 2012 jusqu’en 2022 en Wallonie, en Flandre et à Bruxelles.

Ces chiffres indiquent, depuis dix ans, une baisse de 2000 logements sociaux en Wallonie, une légère augmentation à Bruxelles, mais une augmentation de 20.500 logements sociaux à l’échelle du pays depuis 2012. Cette augmentation de 7% est supérieure à l’augmentation de la population au cours de ces 10 dernières années (+6%).

Nous n’avons malheureusement pas pu remonter plus loin dans les chiffres, mais cette première indication donne plutôt tort à Raoul Hedebouw.

 

Jean-Marc Nollet : “Il y a 20.000 logements vides à Bruxelles et 100.000 en Wallonie”

Vrai.

Face à la crise du logement, et notamment à leur prix élevé, Jean-Marc Nollet a voulu pointer “des logements laissés vides et qui ne sont pas mis sur le marché. Le rôle de l’autorité publique est d’intervenir : il y en a environ 20.000 à Bruxelles et 100.000 en Wallonie.”

En région bruxelloise, un modèle développé récemment par l’ULB et la VUB et relayé dans Le Soir vient tout juste d’estimer de manière précise le nombre de logements inoccupés dans la capitale. Ces chercheurs estiment que “la région comptait entre 17.000 et 26.400 logements vidés de leurs occupants.”

Quant à la Wallonie, le site de la Région et le ministre du Logement Christophe Collignon citent “sur base d’une étude de l’Université de Liège” le chiffre de 100.000 logements inoccupés, comme l’a affirmé Jean-Marc Nollet.

Pourtant, l’étude de l’Université de Liège en question, disponible en ligne et citée au Parlement wallon, cite plutôt le chiffre de 45.000 logements vides. L’autrice de l’étude Mathilde Plas que Faky a contactée explique que ce chiffre a été obtenu en demandant à chaque commune wallonne le nombre de logements qu’elles estimaient vides dans leur entité. Ensuite, la chercheuse a utilisé une deuxième méthode de terrain au niveau de la commune de Herstal en croisant les consommations d’eau, de gaz et les domiciliations pour estimer un nombre de logements vides réels compris entre 5 et 8% du parc de logements de la commune.

“Je pense qu’un journaliste a ensuite appliqué ce ratio de 5%-8% au parc de logements (1,44 million pour la Wallonie, ndlr) et a obtenu 100.000 logements vides au total dans la région, explique Mathilde Plas. Sauf que ce ratio de 5%-8% n’est a priori vrai que pour Herstal, on ne peut pas le généraliser à la Wallonie. On peut, par contre, considérer que le chiffre de 45.000 logements vides est effectivement en dessous de la réalité.”

Le chiffre de 100.000 logements vides en Wallonie n’est donc probablement pas correct, mais il ne peut pas en être tenu rigueur à Jean-Marc Nollet qui a repris un chiffre diffusé par les autorités wallonnes elles-mêmes.